Le 26 avril 2021, célébrons la Journée mondiale de la propriété intellectuelle !
Chaque 26 avril, l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) profite de la Journée mondiale de la propriété intellectuelle (PI) pour mettre en lumière ce qu’est la propriété intellectuelle et son rôle au service de l’innovation et de la créativité. L’OMPI est l’agence des Nations unies qui supervise la négociation des traités internationaux relatifs à tous les aspects de la PI, notamment le droit d’auteur, les brevets et les marques. Pour les archives, ce sont les droits d’auteur qui sont l’élément le plus pertinent. La Journée mondiale de la propriété intellectuelle est donc l’occasion de parler des implications du droit d’auteur dans le contexte archivistique.
Depuis 2010, l’ICA est représenté au Comité permanent du droit d’auteur et des droits connexes de l’OMPI et collabore avec la Fédération Internationale des Associations et Institutions de Bibliothèques (IFLA), le Conseil international des musées (ICOM) et d’autres organismes du domaine du patrimoine culturel. Notre objectif est d’aboutir à un traité international contraignant fixant des exceptions fondamentales en matière de droit d’auteur pour permettre aux archives, bibliothèques et musées (ABM) du monde entier de remplir leur mission, qui consiste à conserver des fonds et à en assurer l’accessibilité.

La législation sur le droit d’auteur diffère d’un pays à l’autre, d’où la nécessité d’un traité international. Le droit d’auteur est une affaire nationale, en d’autres termes, chaque pays dispose de sa propre législation en matière de droit d’auteur, celle-ci s’appliquant uniquement sur son territoire. À l’échelle planétaire, les législations dans ce domaine varient grandement. Certains pays proposent de solides exceptions pour les ABM. Dans d’autres, ces exceptions ne concernent que les documents publiés, tandis qu’ailleurs, les ABM ne bénéficient d’aucune dérogation. Un traité obligerait les pays qui en sont signataires à modifier leur législation respective pour y intégrer les exceptions fondamentales qui permettraient aux ABM de remplir leur mission essentielle partout dans le monde.
Le but de la législation sur le droit d’auteur est de parvenir à un équilibre entre les intérêts des créateurs de documents (leur offrir une juste rétribution pour leur travail) et l’intérêt public (permettre au public d’accéder à ces travaux). C’est ainsi que cette législation pourra favoriser une nouvelle créativité et soutenir le développement des connaissances et de la culture.
En conservant des fonds documentaires ayant une valeur pérenne et en les rendant accessibles au public, les archives servent l’intérêt public. Elles fournissent de la matière brute pour toutes sortes de nouvelles créations : livres, films, travaux d’étudiants, études universitaires et recherches généalogiques. De ce fait, les archives sont automatiquement dans l’obligation de réaliser des copies, mais elles détiennent rarement les droits d’auteur correspondants. Aussi, pour éviter de porter atteinte aux droits d’auteur, les archives s’appuient sur des exceptions légales pour remplir leur mission qui est celle de conserver les fonds qui leur sont confiés et d’en assurer l’accessibilité. Il est urgent de prévoir des exceptions dans les trois cas de figure suivants :
- La conservation exige souvent la réalisation de copies. Ainsi, les organismes archivistiques protègent les originaux fragiles en créant des exemplaires de référence. Pour garantir l’accessibilité des fonds numériques, une pratique courante chez les archivistes consiste à copier des ouvrages au format fermé pour les convertir en format ouvert.
- L’accessibilité de nos fonds à des fins d’étude et de recherche implique également de créer des copies. En effet, les institutions d’archives ne prêtent pas leurs documents mais en fournissent des copies aux usagers. Grâce à Internet nous disposons désormais de nouvelles possibilités pour mettre nos fonds à la disposition d’un public plus large en les numérisant et en les publiant en ligne. La fermeture des archives en cette période de pandémie nous a fourni la preuve irréfutable, s’il en fallait une, de l’importance de pouvoir accéder à des exemplaires numériques partout dans le monde.
- La territorialité du droit d’auteur est par nature incompatible avec la société mondialisée d’aujourd’hui. Il n’est pas rare que les chercheurs aient besoin de consulter des fonds documentaires situés dans d’autres pays (pour des raisons liées la colonisation ou aux migrations ou à caractère commercial) dans le cadre de leurs activités universitaires ou personnelles, ou pour faire valoir des droits en lien avec la nationalité, l’identité ou la propriété. Certaines nations prévoient des exceptions au droit d’auteur pour permettre la création de copies. Toutefois, qu’en est-il de l’envoi de copies vers un pays appliquant des dispositions différentes en matière de droit d’auteur ou qu’en est-il des copies non conformes à la législation du pays destinataire en question ? Que doit faire l’archiviste ou l’usager pour être certain d’être en conformité avec la loi ?
Par conséquent, les institutions d’archives ont besoin d’exceptions en matière de droit d’auteur pour pouvoir servir l’intérêt public, sans crainte d’enfreindre ? ce droit. De telles exceptions sont essentielles afin d’assurer l’équilibre de la législation sur le droit d’auteur. Une application cohérente de ces exceptions est nécessaire pour l’exécution efficace de prestations archivistiques en adéquation avec les objectifs sociaux de cette législation. Les archivistes et leurs alliés continueront de plaider en faveur d’un traité prévoyant les exceptions fondamentales nécessaires à la bonne réalisation de leur mission au service des usagers, et ce à l’ère de la mondialisation.
Dre Jean DRYDEN, Représentante de l’ICA au Comité permanent du droit d’auteur et des droits connexes de l’OMPI