Preuves et confiance

Meena Gautam

Meena Gautam

La confiance est une composante bien connue du monde de l’archivage classique, mais l’archivage numérique a totalement changé la donne dans cette discipline et a remis en question les principes de base de la gestion archivistique, ceux-là même qui sont enseignés et étudiés dans nos cursus. Pour un document numérique, le grand défi est de se voir reconnu par les tribunaux comme document ayant valeur légale et par les utilisateurs comme source d’informations dans le cadre de recherches historiques. En Inde, les documents numériques sont de plus en plus acceptés à titre de preuves, à condition de respecter tous les paramètres définis par la loi. 

La loi indienne sur l’Informatique de 2000 précise, à l’article 2 (t), que « les documents électroniques sont des données, enregistrées ou créées, sous forme audio ou visuelleenvoyées ou reçues sous format électronique, sur microfilm ou sur microfiche générée par ordinateur ». La loi indienne de 1872 sur la nature des preuves a elle-même été modifiée pour inclure un renvoi à l’article 92 de la loi de 2000 sur l’informatique dans son article 3 (b), désormais rédigé ainsi : « tous documents, y compris archives électroniques, présentés devant la Cour en vue d’une prise en compte ». Selon les articles 65A & 65B de cette même loi, les preuves électroniques sont désormais des preuves comme les autres qui, si elles sont dûment confirmées selon les dispositions prévues à l’article 65B, peuvent être prises en compte par le tribunal. Le cas s’est déjà présenté à de très nombreuses reprises en Inde, mais toujours sous couvert de justificatifs et d’authentification. 

Pour les données numériques, la confiance est un élément essentiel dans le cas où celles-ci, créées à des fins particulières en vue de respecter certaines obligations et conservées de manière convenable par l’entité responsable de sa création ou par une instance juridique dûment autorisée, sont destinées à être acceptées dans un cadre juridique par un utilisateur ou devant un tribunal. 

Les données numériques recèlent leurs propres défis quant à leur archivage à long terme. Il convient de préserver l’intégrité de l’information, de parer à l’obsolescence et d’assurer la lisibilité pérenne des archives numériques, facteur d’une importance primordiale. Les données numériques sont particulièrement vulnérables à la falsification et à l’altération. Elles sont donc tributaires de services techniques régulièrement mis à jour en vue de sécuriser et de conserver comme il se doit les contenus numérisés.  

Il est vrai que le stockage des informations sous forme numérique est une solution très économique, nécessitant moins d’espace que les documents papier. Les informations sont accessibles en ligne simultanément par de nombreux utilisateurs se trouvant dans des lieux divers, ce qui permet de gagner en temps et en efficacité, l’utilisateur n’ayant plus à se rendre en personne aux services d’archives. 

La perte de données est moins fréquente dans le cas des archives numériques, car des redondances peuvent être prévues. La perte de documents constitue certes un risque, mais ce risque est encouru tant par les archives traditionnelles (sur papier, etc.) que par les archives numériques. Le numérique offre également l’avantage de permettre un stockage de sauvegardes dans différents endroits, dans des conditions plus rentables que la réalisation de copies papier.  

Aujourd’hui, les supports électroniques s’imposent de plus en plus grâce à la retransmission des actualités et la télédiffusion en direct d’entretiens, de webinaires, etc. Les témoignages produits en visioconférence sont désormais monnaie courante et considérés comme recevables par les tribunaux indiens. En raison de la pandémie actuelle, tous les services de l’État fonctionnent grâce aux moyens virtuels et usent de procédés électroniques dans l’exécution de leurs missions. De même, les universitaires donnent des webinaires, leurs séances interactives générant de nombreuses données numériques, ce qui favorise l’archivage numérique et renforce les sociétés du savoir.